07/02/2013

Certaines n’avaient jamais vu la mer, Julie Otsuka (Phébus, 2012)

Aline Sirba, notre chroniqueuse littéraire, a lu pour nous cette semaine un beau livre de mémoire, qui vient d'obtenir le prix Femina étranger : il rend hommage à ces femmes japonaises qui ont dû s'exiler vers les Etats-Unis dans les années 20 pour des mariages arrangés avec les Japonais migrants, fascinés par le mirage américain. Comme le souligne Aline, "elles sont pleines d'espoirs en partant mais elles arrivent en enfer. L'auteur prête sa plume à des voix douloureuses jamais entendues. C'est beau, puissant, poétique, et redonne vie aux oubliées de l'Histoire".
Pour mémoire.
              Certaines n’avaient jamais vu la mer, Julie Otsuka (Phébus, 2012)
 Julie Otsuka, romancière américaine, fait partie de ces écrivains qui veillent sur le souvenir. Pour pallier notre indifférence et nos mensonges par omission, pour rattraper notre mauvaise conscience collective, ils ont ce don de redonner vie aux oubliés de l’Histoire. Certaines n’avaient jamais vu la mer, étonnant chant sorti du tombeau de la mémoire, a reçu le prix Femina Etranger en 2012.  
Au début des années 1920, des Japonais venus tenter leur chance aux Etats-Unis, eldorado alors en manque de main d’œuvre, font venir des femmes de leur pays natal, des Japonaises avec lesquelles ils se marient par procuration, au prix de quelques arrangements financiers avec les familles pauvres des candidates à l’exil. Au moyen du pronom personnel « nous », voix féminine collective, ces Japonaises émigrées racontent leur histoire, qui s’élève sur un mode incantatoire propre à la lamentation funèbre du thrène antique, entre récit de vie et gémissements. Ce mode de narration original évolue subtilement au fil des pages, la clameur plaintive laissant la place à un récit plus apaisé qui s’individualise et permet de distinguer des voix émergeantes de plus en plus nombreuses. Il n’y a pas une seule héroïne, toutes les femmes sont des héroïnes inconnues, toutes ont leur pierre à apporter à l’édifice du souvenir. C’est cette litanie qui compose le roman, fixée pour l’éternité dans une écriture magnifiée par son propre écho.
Aline Sirba
Vous trouverez l'intégralité de cette chronique dans la page "la plume au vent" de ce blog.

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